Articles de Novembre 2004

Paul Heyberger, le président du HC Mulhouse, ne le cache pas. Quand il a reçu il y a un peu plus d'un mois la confirmation officielle de la venue de l'attaquant vedette des Calgary Flames Steven Reinprecht, pour toute la durée du lock-out en NHL, quelques doutes se sont insinués dans son esprit. « On n'accueille pas un international canadien champion du monde sans quelques appréhensions, sourit-il. Comment gérer un joueur de ce calibre ? Comment répondre à ses besoins ? Comment allait-il s'adapter à la vie en France et au jeu pratiqué dans notre petit championnat ? Évidemment, je me suis posé toutes ces questions. » Des questions auxquelles le président mulhousien est aujourd'hui heureux -et surtout soulagé- d'avoir les réponses. Plus de quatre semaines ont passé et son téléphone n'a toujours pas reçu le moindre appel du jeune homme, à qui le trois pièces mulhousien et la petite Peugeot 206 suffisent amplement. Pas un seul petit caprice de star US. « Nous sommes vraiment tombés sur un mec exceptionnel, épatant », dit Paul Heyberger. Un mec bien, tout simplement, que les millions de billets verts et la renommée n'ont visiblement jamais changé d'un iota.

"J'ai trouvé ici tout ce que j'espérais"

« Les efforts, c'est lui qui les a faits pour s'intégrer, glisse Christer Eriksson, l'entraîneur du HCM. Il joue parfaitement le jeu, apprend le français et ne bronche jamais, même quand il faut aligner des dizaines d'heures de bus alors qu'il ne connaissait jusqu'à maintenant que le jet privé aux États-Unis. Il est humble et très pro. C'est une vraie crème. » Venu tenter l'expérience en France pour découvrir « quelque chose de différent », rejoindre ses compatriotes Ryan Christie et Steve Montador et, accessoirement, garder la forme durant la cessation d'activités en NHL, le solide gaillard natif de Vancouver s'est fondu dans son nouveau décor avec une rapidité surprenante et un plaisir affiché. « Cela fait un mois que je suis là mais j'ai l'impression d'être à Mulhouse depuis bien plus longtemps, explique-t-il d'une petite voix timide. Pour l'instant, je trouve ici tout ce que j'espérais en arrivant. C'est une très belle expérience pour moi mais aussi pour ma femme. Si je n'ai pas encore eu le temps de visiter beaucoup d'endroits, je trouve la région très belle et très dépaysante. Les gens sont agréables et m'ont accueilli avec une grande chaleur. Dans l'équipe, j'ai pu trouver mes repères grâce à la gentillesse de tout le monde ! Et puis le niveau du championnat m'a quand même surpris. Il y a de très bons joueurs et de très bons jeunes. Dans quelques années, j'en suis sûr, la France aura un championnat qui sera plus reconnu à l'étranger. » Dans le petit milieu du hockey français, le débarquement de Steven Reinprecht a eu en tout cas l'effet d'une bombe. Là où le dernier finaliste de le NHL patine, la presse nationale n'hésite plus à faire le déplacement et les gradins affichent complet. A Tours ou à Villard, comme à l'Illberg, les records d'affluence sont quasiment tombés ces dernières semaines. « No problem ! » lance-t-il, lorsqu'on lui demande d'évoquer l'effervescence qui règne autour de lui aux quatre coins de la Ligue Magnus. « Ça ne me dérange pas d'être un peu plus attendu que les autres joueurs parce que j'évolue en NHL, assure-t-il. Ça fait même plaisir ! Et puis ici, je ne suis franchement pas surmené. Aux États-Unis, la pression est bien plus importante et la vie est plus éprouvante. A Calgary, le premier entraînement commence très tôt le matin. On joue quasiment trois fois par semaine, la fatigue est toujours présente. Ici, c'est plus "relax". Je prends plus le temps de vivre. » Pour faire étalage de son talent sur la glace, Steven Reinprecht n'a en revanche guère pris son temps. Auteur d'un premier but dès sa première apparition sous le maillot des Scorpions, le Canadien compte aujourd'hui 9 points (6 buts, 3 assists) à son compteur. Alors qu'il n'a même pas disputé la moitié des rencontres du HCM (5 sur 11) depuis le début de la saison, son total fait déjà de lui le 5e meilleur pointeur de l'équipe. « Il sait tout faire avec un palet, va très vite et voit parfaitement le jeu, dit Eriksson. Il a aussi une bonne mentalité et il n'a donc pas essayé de faire le show à lui tout seul. En fait, on peut difficilement lui trouver des points faibles. » On comprend mieux pour quelles raisons l'entraîneur suédois du HCM et son président Paul Heyberger prient chaque jour pour que la saison de NHL soit définitivement annulée dans les prochains temps. « On en saura plus en fin d'année, assure le joueur canadien. Des négociations vont reprendre avec les propriétaires des franchises. En tout cas, si on ne reprend pas aux États-Unis, ça me fera plaisir de continuer avec Mulhouse. Sur ce que j'ai vu depuis mon arrivée, on a le potentiel pour gagner le titre… »