Comme un poisson dans l'eau
Article Le
Bien Public (21 novembre 2003)
Après
un peu plus d'un quart de siècle passé à Briançon, son village natal,
Jean-Michel Bortino a débarqué à l'intersaison dans la capitale des Ducs,
pour son plus grand bonheur.
S'il est un Dijonnais particulièrement concerné par la venue de Briançon, demain soir, à l'occasion d'un match capital pour la qualification en coupe Magnus, c'est bien Jean-Michel Bortino. C'est dans la cité des Hautes-Alpes qu'il est tombé dans la marmite hockey, dès l'âge de cinq ans : « A Briançon, c'est soit le patin, soit le ski ! Mon choix a été vite fait car le hockey est dans les gènes de tout Briançonnais. D'ailleurs, il y a un dicton célèbre là-bas qui dit que c'est le hockey qui fait couler les maires, c'est dire son importance. »
Formé à l'école Dennis Murphy, actuel entraîneur de Villard, et Marc Peythieu (ex-entraîneur adjoint de l'équipe de France), cet attaquant de poche (1,70 m, 75 kg) gravit tranquillement tous les échelons dans une fantastique ambiance : « A l'époque, les « Diables Rouges » étaient le Rouen actuel : une terreur hexagonale ». Cependant, un grain de sable vient enrayer la belle mécanique : « En 1992, Briançon dépose le bilan. Le club repart alors en D3 et les dirigeants, contraints et forcés, donnent leur chance aux jeunes issus du cru. A 16 ans, je débute donc en seniors. » L'amorce d'une fabuleuse aventure débouchant sur une première consécration nationale : « C'était merveilleux. On disposait d'une équipe de folie ! Que des copains, on mettait 30-0 à tout le monde. Après, on faisait une fête du tonnerre, c'était génial. » L'embellie se poursuit la saison suivante avec un nouveau titre à la clé.
En mai 1997, après deux saisons d'apprentissage en D1, les lauriers nationaux sont une nouvelle fois au rendez-vous : « On a été champion de France en battant Villard en finale. Chez nous, lors du match aller (victoire 3-2), on avait un Canadien qui a cartonné Murphy - alors joueur chez les « Ours du Vercors ». A la suite de cet incident, il y a eu une campagne de presse hallucinante. Notre joueur a reçu des menaces. Il a même été contraint de déclarer forfait. C'était le feu ! Malgré ce contexte hostile, on a réussi l'exploit (3-2). Ca restera gravé à jamais. »
La page est tournée
Appelé de surcroît en équipe de France juniors à plusieurs reprises, le bonheur est sur la glace. Toutefois, l'histoire d'amour avec Briançon se termine en queue de poisson en juin dernier : « On m'a pris pour un imbécile. Dès qu'on fait partie des locaux, on se fait exploiter. On n'a aucune gratitude. Au contraire, on fait venir des étrangers qu'on paie deux fois plus cher pour un résultat identique voir moindre. » Dans ce contexte conflictuel, pour la première fois de sa vie, il quitte ses montagnes natales et effectue le grand saut : « Je ne le regrette absolument pas. J'aurais même dû le faire bien plus tôt ! »
Une
nouvelle vie commence : « Tout est différent. Je passe d'une ville
de 10 000 à plus de 200 000 habitants, c'est autre chose. La gestion
du hockey est également différente. A Dijon, c'est plus confidentiel, plus
cool également. » Parfaitement intégré à son nouveau club avec un
poste d'entraîneur du hockey mineur à la clé, le pari est gagné même si
sportivement tout n'est pas parfait : « Daniel ne me fait pas trop
jouer. Mais, d'une part, vu les résultats, je le comprends, et d'autre part, je
continue à penser qu'il fera appel à moi à un moment ou un autre et là, je
lui montrerai que je suis prêt. A 28 ans, je suis plus philosophe. D'ailleurs,
la situation va certainement changer avec la venue de Thomas Gueguen. On va
pouvoir aligner quasiment quatre lignes offensives. On va s'entraîner à fond
pour décrocher la Magnus. Moi en Magnus et pas Briançon, ce serait une belle
revanche ! »
Jérôme Roblot