Le "diable rouge" sur la glace
Article des Dernières Nouvelles d'Alsace (14 septembre 2003)
Maxime
Schuchewytsch a quitté son pays, la Belgique, à l'âge de trois ans. Installé
en Alsace, il s'est initié au hockey sur glace, avant de devenir international.
Il rêve d'un Mondial B endiablé. Il vient de quitter l'Étoile Noire de
Strasbourg pour les Scorpions de Mulhouse.
« La
Belgique ? Cela n'a rien d'exceptionnel, c'est juste que je m'y sens chez
moi. » Maxime Schuchewytsch est né dans la banlieue de Bruxelles, à
Louvain-la-Neuve, une petite ville universitaire, avant d'émigrer pour
Strasbourg, vers l'âge de trois ans. Mais il n'a jamais lâché sa nationalité,
ni renié ses origines, il porte même les couleurs de son pays natal, avec l'équipe
nationale de hockey sur glace.
« Complètement
belge »
« Dans
les vestiaires, cela fait gentiment sourire, raconte-t-il. On me demande si je
n'ai pas joué contre le Zimbabwe, je leur réponds que j'ai affronté la Corée... »
En avril dernier, la Belgique a remporté son Mondial C, face à la Bulgarie, la
Corée, Israël, la Chine et l'Islande. « C'était la première fois que
je gagnais quelque chose. Dans mon armoire, j'ai gardé le maillot, avec ma médaille
à côté. » Agé de 25 ans, étudiant ingénieur en informatique,
il ne vit pas en Belgique, mais il aime ce pays, son pays, même s'il se sent
bien en Alsace aussi. « Je suis complètement belge, j'y retourne souvent,
dès que je peux. J'y ai toute ma famille, mon père y est et puis, les frites,
là-bas, ce n'est pas qu'une légende. J'apprécie le mode de vie, l'ambiance,
la mentalité, ils me correspondent bien. »
Un
coup de fil...
Afin
d'éviter le service militaire, il n'a pas demandé à bénéficier de la double
nationalité, n'hésitant pas, à la même époque, à téléphoner à la fédération
belge pour savoir s'il y avait une place pour lui, au sein de la sélection.
« J'avais 19 ans. Comme le hockey n'est pas très développé là-bas, je
me suis dit que j'avais peut-être une chance. Je ne suis pas connu, j'ai alors
appelé... » L'essai est concluant : depuis 1997, il en est à
ses quatrièmes championnats du monde. Cette saison, il compte bien multiplier
les matchs amicaux afin de préparer au mieux le Mondial B. « Si la France
n'était pas montée, nous aurions pu jouer contre elle... cela m'aurait fait
plaisir. Les Flamands de l'équipe, eux, sont heureux, ils vont pouvoir se
frotter aux Hollandais. Beaucoup jouent là-bas. »
Le
seul Wallon
Son
intégration n'est pas facile, il est le seul francophone - « Je comprends
un peu le flamand... c'est très moche. » -, avec Mike Pellegrims, il est
l'un des rares à évoluer au loin. « Lui, c'est la vedette de l'équipe,
il évolue en DEL, à Dusseldorf. Il est fort et il est belge, je trouve cela
ironique. Les autres ont un niveau correct, sans plus. Le groupe est soudé, ils
se connaissent de longue date. » Quand eux sortent boire la bière
d'après-match, lui reste seul, avec le sentiment d'être à l'écart, sans
attache extra-sportive avec ses coéquipiers. « Je ne les vois que
quelques fois par an, explique-t-il, mais, sans être patriote, je suis très
fier de ce qu'on a réalisé au dernier Mondial. Cette année, on va jouer
contre la Norvège... cela commence à être du bon niveau. On devra bien se préparer. »
Ancêtre
héroïque
Ce
superbe maillot, floqué du lion sur le ventre, aux couleurs noires, jaunes et
rouges, il en est un peu plus fier aujourd'hui. Il entend moins de moqueries de
la bouche de ses coéquipiers, venus de France, Slovaquie, Suède ou Finlande.
« Luc Tardif est aussi belge, enfin à moitié. Pour nous, disputer le
Mondial B, c'est quelque chose, on va jouer contre des vedettes de la NHL ! »
Ces heures de gloire n'ont pas réveillé l'enthousiasme des foules,
outre-Quiévrain. « Certains Belges ne savent même pas qu'il y a une équipe
nationale de hockey, le pays n'est pas très « glace ». » Son
nom n'est pas près d'y être célèbre, il l'est plus en Ukraine, où un
ascendant, le général Roman Schuchewytsch, est héros national. « Le
jour où mon père y est allé, on lui présenté le tapis rouge... »
Serge Bastide