Bellet, prénom Mathieu

 

Article du Dauphiné Libéré (7 avril 2000).

International junior, l'attaquant des Brûleurs de Loups tâchera de mener les siens à un titre national, face à une opposition beaucoup plus relevée qu'à l'accoutumée. L'occasion pour lui de marquer les esprits et de se faire... un prénom.

Dans les patinoires de France, on connaît son nom depuis un bout de temps. Fils de président, ça classe un (jeune) homme, qui entend souvent rejaillir les mêmes commentaires des tribunes, les mêmes rumeurs du trop célèbre "radio patinoire". Est-ce pour ne pas les entendre qu'il a longtemps eu la tignasse abondante ? Toujours est-il que le garçon a taillé sa route sans se préoccuper des "qu'en dira-t-on", persuadé qu'il se ferait un prénom : << Ça ne m'a jamais gêné, dit-il sobrement. Ce sont plutôt les autres que ça dérange. A la maison, nous parlons hockey, mais simplement côté sport. D'ailleurs, concernant le club, j'apprends plus de nouvelles dans le Dauphiné Libéré que de sa bouche ! >>

Il doit toutefois une partie de son initiation au hockey à son père. Alors que Jean-Jacques se passionne pour le football, et ne porte qu'un intérêt de spectateur au monde du palet, il emmène le petit Mathieu, cinq ans, assister au championnat du monde à Megève. Une révélation : << J'avais la bougeotte et voulais pratiquer un sport. Comme le football ne prenait les enfants qu'à partir de six ans, j'ai débuté le hockey. >> Le virus le saisit immédiatement et, par un concours de circonstances, c'est son père qui le suivra pour prendre en main les destinées des Brûleurs de Loups, quelques années plus tard. Lui taille sa voie et franchit les catégories avec bonheur, jusqu'à un premier titre de champion de France minimes.

Mathieu est vif, rapide, plutôt téméraire, et côtoie déjà Marc Billiéras, avec qui il joue aujourd'hui depuis dix ans côte à côte. Avec Grenoble, avec les équipes nationales de jeunes, les deux garçons progressent, au point de susciter en un beau jour d'hiver 98, l'intérêt de Jaroslav Jagr : << Pendant la trêve des Jeux Olympiques de Nagano, qui mobilisait quelques joueurs de l'équipe fanion, les seniors disputaient un tournoi amical à Lyon. "Jaro" nous y a conviés. Mais je n'ai effectué mes premiers pas en seniors que l'année d'après. >> Comme Billiéras, comme Bergamelli, il profite d'un effectif maigrelet en attaque pour faire ses débuts en élite, et en Ligue européenne. Il est de la victoire à Fribourg, des déplacements aux quatre coins de l'hexagone et des performances à répétition des Brûleurs de Loups. Et comme l'histoire a des raccourcis saisissants, il inscrit son premier but en élite face à... Bordeaux, principal rival de Grenoble ce week-end, sur une passe... d'Ari Salo, qui l'entraîne aujourd'hui et évolue derrière Mathieu en défense ! << Jouer avec Ari, c'est un réel plaisir car les passes arrivent dans le timing... tout est plus simple avec un tel joueur. >> Pour autant, sa saison n'a pas été un long fleuve tranquille. Avec les juniors, il effectue un début de saison poussif, << qui s'explique par le manque d'heure de glace jusqu'en décembre. On a prouvé par la suite qu'on méritait mieux puisqu'on a nettement dominé Amiens (7-3) sacré quelques semaines plus tard. Par contre, en division 3, avec ces rencontres sans réelle opposition, difficile d'être motivé et de ne pas régresser. >> Pour éviter de perdre les acquis de la saison précédente, Mathieu et Marc s'en vont s'entraîner parfois avec Megève (D1), << notamment avant les championnats du monde juniors cet hiver. On s'est aperçu, lors du stage avant le Mondial en Biélorussie, qu'on avait perdu des automatismes. Question réflexe et vision de jeu, la D3 nous a causé du tort. >>

Après une année sans intérêt, il montre lors du tournoi demi-finale à Amiens, qu'il possède encore de sacrées qualités. Cinq buts, et une présence efficace en attaque, en font l'un des fers de lance du groupe, qui, durant ces trois jours, voudra s'imposer sur ses terres : << En Picardie, tout fut loin d'être parfait, surtout contre Wasquehal où nous nous sommes fait peur un peu tout seul. Nous avons une équipe homogène, à nous de ne pas nous affoler et d'attendre les ouvertures. >> La première rencontre, cet après-midi contre Amiens, devrait donner le ton. Aux Isérois de monter en puissance pour arriver, demain contre l'autre favori, Bordeaux, au sommet de leur forme.

Quant à l'avenir, en D2 en D1 ou en élite, Mathieu ne désire qu'une chose : << que la situation ne traîne pas trop en longueur. L'important, c'est de savoir vite à quoi s'en tenir pour que chacun puisse rebondir comme il l'entend. >> De sages paroles qui ne dépareilleraient pas dans la bouche de qui vous savez...

Jean-Benoît Vigny

 

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